Récits

Récits, impressions, projets, coups de gueule, d'un photographe au Mali.

vendredi 30 octobre 2015

Prêts pour les Rencontres de Bamako ?

Enfin ! Quatre ans, c'est long, surtout entre deux biennales...

Nous avons attendu, parfois dans le doute (il paraît que Cotonou va nous prendre la Biennale ???), maudissant en vrac les djihadistes, les narcos, Haya Sanogo, la transition, les français trop peureux, ou trop entreprenants, et qui d'autre encore ?

Pendant quatre longues années, le Mali a plus souffert de son carton rouge de pays en guerre que de la guerre elle-même : tourisme réduit à néant, exode massif souvent suivi de décès des "aventuriers", ces candidats au rêve d'Europe, qui vide le pays de ses jeunes les plus entreprenants, aides financières internationales suspendues, confusion sociale génératrice de prévarications diverses, et autres calamités collatérales.

Arrivée à Bamako des tirages de l'exposition "Émoi Photographique", Angoulème 2015
Malgré tout, nous avons voulu que vive la photographie au Mali : enfin, quoi, serions-nous incapables de produire des images sans la Biennale ? C'est ainsi qu'en quatre ans, nous avons vu émerger de jeunes talents qui ne doivent rien à cette fièvre événementielle, pour la simple raison qu'ils sont trop jeunes pour l'avoir connue. Grâce aux "événements", ils ont aussi échappé au formatage qui faisait florès en temps de paix, quand les stages de formation payaient des vacances exotiques à des toubabs parachutés par quelque association bienfaisante, sinon bienpensante, et prompte à se retirer au moindre bruit suspect...

Olabisi Silva, commissaire d'exposition des Rencontres de Bamako, et votre serviteur.
Donc, demain et pour une semaine, Bamako devient Saint-Tropez sur Joliba. Une nuée de charmant(e)s attaché(e)s de presse, en majorité français(es) et célibataires temporaires, va investir la vie nocturne de la cité des trois caïmans, pour vérifier la taille des objectifs ou la profondeur de champ des photographes locaux. Le contingent habituel d'universitaires au front plissé va répandre sa connaissance de la photographie africaine devant des auditoires médusés de photographes maliens qui ignorent tout de leur propre démarche, naïfs qu'ils sont de croire que la photo, ben, c'est prendre des photos, ou bien ?

Susan Loehr (ARTE) en tournage chez EPP pour l'émission Métropolis
Mais ne boudons pas notre plaisir, tout concorde pour que cette Biennale 2015 soit un cru exceptionnel, voire même un grand renouveau pour la photo au Mali et en Afrique. Pour la première fois, la biennale est mise en scène par une commissaire d'exposition issue d'Afrique noire. Olabisi Silva, nigériane, a su y insuffler toute l'énergie dont sont capables les africains anglophones. Elle a sillonné le continent, suscitant un nombre de candidatures jamais atteint dans les précédentes éditions. Elle s'est entourée de personnes de valeur, comme Antawan I. Byrd et Yves Chatap, co-commissaires, Chab Touré, un vétéran des Biennales, et bien d'autres qui me pardonneront de ne pas les avoir cités ici. Je vous renvoie au site des Rencontres pour plus d'infos : http://www.rencontres-bamako.com/

Puissent les francophones en tirer des leçons, eux si prompts à assoir du thé en attendant d'hypothétiques subventions sans lesquelles rien ne peut se faire.


Votre serviteur embauché comme traducteur pendant la Masterclass de Uche Okpa Iroha, à la Galerie Médina
Le Off des Rencontres est lui aussi en pleine expansion, et prometteur. Espace Photo Partage - Jawmali y figure en bonne place avec Génération 2015, qui présente les jeunes photographes émergents, et en bonne compagnie : parmi bien d'autres, Igo Diarra, le brillant animateur de la Galerie Médina, a lui aussi multiplié les initiatives pour faire du Off un incontournable capable de rivaliser avec le festival officiel.

Mes panoramiques en cours de tirages chez Marc Tallec, Atelier Ooblik

Souhaitons que dans les prochaines éditions, le Off réussisse à s'organiser de manière autonome. En effet, situation quelque peu surprenante, le Off est encore géré par le In. Autonomie qui n'est pas acquise d'avance, tant les acteurs du Off sont perturbés par des priorités plus financières qu'artistiques. Je gage que Samuel Sidibé, directeur du Musée National et grand ordonnateur de la manifestation, en serait considérablement soulagé.

Pour finir, voici le programme que nous, Espace Photo Partage - Jawmali, avons concocté pour votre plus grand plaisir :

1- Exposition en plein air “Génération 2015”
Du 1 au 31 novembre 2015.
Ouverture et vernissage le dimanche 1 novembre à 16:30h, autour des locaux de Jawmali-EPP. L’exposition inclut :
- Retour sur les expositions “L’Émoi Photographique”, Angoulème 2014 et 2015. Avec Aly Barro, Hamdia Traoré, John Kalapo, Zoumana Sidibé.
- Le temps du Bogolan, par Souleymane N’Diaye.
- Présentation de “TATA”, photos de Marc Tallec : un cimetière de tirailleurs africains au fond de la campagne lyonnaise.
- “Mali, souvenirs de 2007”, photos de Patrick Ertel.
- Projections des travaux des membres de Jawmali-EPP.

2- Le mercredi 4 novembre á l’INA (Institut National des Arts) :
10:00h. Causerie débat autour de la photographie, animée par Erika Nimis, Emmanuel Bakary Daou et Patrick Ertel.
17:00h. Vernissage de l’exposition du Collectif Elili, Congo-Brazzaville.

3- Le vendredi 6 novembre à 16:30h. au restaurant “Le Bafin”, chez Ibrim, quartier du fleuve, vernissage :
- “I ni gwa”, hommage à la cuisine des femmes, photos de Assétou Touré, lauréate du concours photo Jawmali-EPP 2015.
- Quatre paysages du Mali, panoramiques de Patrick Ertel.

4- Le lundi 9 novembre à 11:00h., à la Pyramide du Souvenir, face Ambassade de France :
Cérémonie officielle de don à la Pyramide des photographies de Marc Tallec, “TATA”.

Plan d'accès à Jawmali - EPP
Jawmali-EPP est situé à Hamdallaye, sur le goudron du marché de Oulofobougou, près du Diafarana Pont, à 10 mn de taxi du Musée National. Si votre chauffeur ne connait pas, appelez Hamdia au 63 09 42 82 qui lui donnera toutes les explications.

Jawmali-Espace Photo Partage
Immeuble Blangalaman, rue 42, porte 224, Hamdallaye
Contacts :
Emmanuel Daou : 66 71 66 53 - manuelbak1@yahoo.fr
Patrick Ertel : 96 08 29 81 - patrick.ertel@gmail.com
Yacouba Sangaré : 66 73 11 16 - spm.sangare@gmail.com
Sur Facebook : “Bamako Samedi Photo” et “Espace Partage Photo”

Merci à tous nos partenaires : Imprim Color - CMDT - Labo photo vesta - Labo 22 septembre - Sacko Electronic 2000 - Bistro Bafing - Kané - Digicom - Majo Imprim - Papeterie le Larousse opc - Diarra Electronic chez Lassina - Association Acte Sept - Créapub chez Delessy



mardi 30 juin 2015

Espace Partage Photo exposera le travail de Marc Tallec, "Tata", pendant les Rencontres de Bamako 2015

Le tata de Chasselay, officiellement nécropole nationale de Chasselay, est une nécropole militaire située à Chasselay dans le Rhône, où sont enterrés 194 tirailleurs originaires de différents pays d'Afrique de l'Ouest, ainsi que deux légionnaires, tous massacrés par la division de SS allemande Totenkopf en juin 1940.



Dans les années 70, roulant dans la région lyonnaise au petit matin, j'avais vu surgir de la brume matinale cet improbable construction africaine, je l'avais visitée et ne l'ai plus jamais retrouvée. Il m'en était resté l'amertume de ne pas avoir mon appareil photo avec moi ce jour-là.
 
Bien des années plus tard, Marc Tallec a découvert près de chez lui ce cimetière en forme de Tata, et il en a fait l'inventaire avec la rigueur qui caractérise son travail.


Je connaissais cette série depuis qu'il l'avait réalisée en 2014, et j'ai pensé qu'elle avait sa place chez nous, lors des Rencontres de Bamako 2015, dont le thème est "Conter le temps".

Il a accepté de nous confier ses images, et nous ferons de notre mieux pour les mettre en valeur, dans le "off" du festival, qui représente la meilleure part des Rencontres de Bamako.

 Marc soutient notre structure Espace Partage Photo à Bamako depuis nos débuts, notamment par des dons de matériel photo, et nous sommes heureux de pouvoir lui manifester ainsi notre reconnaissance.

Notre intention est de faire en sorte que ses photos soient vues par un large public. Peut-être que quelqu'un y retrouvera un parent, qui sait ?

 Vous pouvez voir la série complète ici, sur son site.

Marc est aussi un talentueux et rigoureux tireur numérique qui consacre toute son énergie à la mise en valeur du travail de nombreux photographes de talent.  Voyez ici le site de son atelier "Ooblik". 

Sur Facebook, retrouvez Marc Tallec ici, et l'atelier Ooblik ici.

jeudi 25 juin 2015

Ce que je ne fais pas au Mali.



Au Mali
Je ne creuse pas de puits dans le désert*.
Je ne donne pas de tentes aux réfugiés*.
Je ne distribue pas de riz aux populations* affamées.
Je ne vaccine pas d'enfants*.
Je ne sauve pas de folklore* de l'oubli.
Je ne milite pas contre des coutumes barbares*.
Je ne crée pas de start-up* promises à un bel avenir.
Je ne milite pas contre un troisième mandat d'un quelconque président*.
Je ne conseille pas les femmes* sur le planning familial.
Je ne fais pas de reportages sur la misère*, ni sur l'émergence des classes moyennes*.
Je ne fournis pas de fours solaires aux villages* victimes de la déforestation.

(* subsaharien-ne-s, ou bien noir-e-s, au choix)


Au Mali, je fais seulement ce que je sais bien faire : enseigner la photographie, entouré de mes partenaires maliens et de nos élèves.

Dans la certitude que, par leur travail, ils témoignent eux-même de leur propre pays, et sont des citoyens et des témoins actifs dans la résolution des problèmes qu'il affronte.

Si vous avez envie de nous aider, notre crowdfunding est ici.

P.S. : J'oubliais : je ne cherche pas à me faire payer des vacances au Mali.
Parce que j'y vis.